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Écolo : remonter la pente. L’écologie politique a-t-elle encore un avenir ? (présentation)

Lors des élections du 25 mai, Écolo subit une défaite que personne n’attendait dans de telles proportions. Premières réactions du parti : incompréhension totale – la campagne avait été si bonne et l’accueil de la population si sympathique. Ensuite : on serre les rangs autour de sa direction, qui refusera dans un premier temps d’endosser la responsabilité de la défaite. Manifestement, le parti vert, sonné, ne prenait pas la mesure de l’événement. Mais avec la prise de conscience bien matérielle que cette défaite faisait perdre à Écolo la moitié de ses moyens humains et financiers, les langues et les plumes se délièrent. Pouvait-on laisser à une direction qui avait failli la responsabilité de gérer les licenciements et les coupes sombres ? Et pouvait-on s’en remettre à un simple audit interne pour déterminer les rectifications nécessaires ? Il fallait un véritable débat d’orientation politique, quitte à briser le mythe du consensus qui, depuis trop longtemps, interdisait l’expression de tout désaccord par rapport aux orientations imposées par le groupe dirigeant.

Écolo tournerait le dos à son histoire – et à ses prétentions – s’il n’ouvrait pas ce débat à toute cette société civile dont il est historiquement une des émanation.

Ce fut le mérite d’une motion, baptisée Phénix 2.vert, d’ouvrir ce débat devant le Conseil de fédération – le parlement interne d’Écolo – le 13 juin. Cette motion dénonçait la confusion du message et la communication aseptisée et pointait, en amont, la rupture d’Écolo avec les publics qui l’avaient porté. Succès d’estime, mais échec prévisible, tant restait puissant le réflexe légitimiste : ce n’était pas le moment de donner l’image de la division. Mais le processus était lancé. Écolo n’échappera pas à un sérieux travail de réflexion sur l’identité et la fonction d’un parti écologiste au XXIe siècle. Moment-clé de ce processus : l’élection annoncée pour mars 2015 d’un nouveau duo de coprésidents. Comment ce débat sera-t-il mené ? Cela concerne au premier chef Écolo, ses membres et ses instances. Mais pas seulement. Écolo tournerait le dos à son histoire – et à ses prétentions – s’il n’ouvrait pas ce débat à toute cette société civile dont il est historiquement une des émanations. En programmant ce thème, Politique s’engage. Revue de « toute la gauche », nous estimons en effet qu’il ne saurait y avoir d’alternative au libéral-capitalisme sans une forte composante écologiste ancrée à gauche. S’exprimant après un cadrage d’Henri Goldman, c’est aussi l’avis majoritaire des personnes qui ont répondu à notre appel. Toutes sont enracinées dans la « société civile ». Elles portent une critique souvent dure, mais toujours amicale que les écologistes devraient entendre à l’heure des bilans et des perspectives. C’est le cas d’Arnaud Zacharie (CNCD- 11.11.11), de Bernard Kerger (Mouvement ouvrier chrétien, Luxembourg), d’Olivier Starquit (collectif Le Ressort) et de Felipe Van Keirsbilck (Centrale nationale des employés – CSC). Deux anciens cadres du parti, qu’ils ont quitté sans s’en éloigner complètement, livrent leur diagnostic : l’ancien sénateur et pédagogue Jacques Liesenborghs et l’ancienne échevine Tamimount Essaidi. Intercalés, deux écologistes français – Alain Lipietz et Lucille Schmidt – resituent la « crise » que suggère le revers électoral d’Écolo dans une perspective européenne et à la lumière des difficultés rencontrées par les Verts français. Enfin, les propos de trois responsables Écolo viennent compléter le tableau : Céline Delforge, députée bruxelloise, Philippe Lamberts, député européen, coauteur de la motion Phénix, et Mohssin El Ghabri, chercheur à Etopia. On verra que leurs propos ne détonnent pas dans l’ensemble. D’autres écologistes ont souhaité nourrir les réflexions de ce dossier : Joanne Clotuche, ancienne secrétaire régionale liégeoise et coautrice de la motion Phénix, Gaspard Denis, attaché parlementaire, Jean- Claude Englebert, échevin à Forest, Jean-François Gerkens, conseiller communal et ancien permanent FGTB, Charles Lejeune, responsable associatif bruxellois, Michaël Maira, coprésident d’Écolo-J, Edgar Szoc, ancien chercheur à Etopia. On y joindra les réflexions de John Pitseys, chercheur au Crisp. Toutes sont d’ores et déjà consultables sur le site de Politique. Enfin, on lira une version courte du nouveau Manifeste d’Écolo adopté en juin 2013 qui constitue, selon de nombreux auteurs, un document de référence trop peu exploité. Ce Thème a été coordonné par Henri Goldman et Joanne Clotuche.