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Nouveau pacte social et de croissance

L’appel a été lancé, la veille du carnaval, par Laurette Onkelinx. Il y aurait urgence, selon elle, pour sauver notre « modèle social ». Sur la cause du péril qui nous menace, le président du VLD, Alexander De Croo, rejoint d’emblée la Vice-première socialiste : « Le travail est trop cher en Belgique ». En conséquence, Laurette Onkelinx propose comme solution de réduire la part de financement de la sécurité sociale par les cotisations à 50%. Le libéral De Croo accueille avec enthousiasme cette proposition. Si socialistes et libéraux sont sur la même longueur d’onde, le « nouveau pacte » serait-il en bonne voie ? Une divergence subsiste cependant : alors que la socialiste souhaite compenser la baisse des cotisations pour le financement de la sécurité sociale par un impôt sur le capital et d’autres taxes, le libéral envisage de recourir à des taxes environnementales et à des diminutions des prestations sociales. Un impôt sur le capital aggraverait encore, selon lui, la situation en faisant fuir les investisseurs alors que la réduction des cotisations visait précisément à les attirer. Une officine d’inspiration patronale, pompeusement appelée « think-tank », approuve également la proposition socialiste tout en condamnant « le populisme politique » qui consiste à vouloir taxer les capitaux Cf. interview de Marc De Vos de l’Itinera Institute, dans Le Soir (23 février 2010). On peut en effet se demander en quoi une taxation du capital, en lieu et place d’une diminution des cotisations sociales, serait plus attractive pour les capitaux et pourrait sauver notre « modèle social » ? La cotisation sociale n’est pas une « charge qui pèse sur le travail » mais un salaire payé par les entreprises. Sa perception à la source est donc le meilleur impôt payé par le capital. Substituer une taxation verte à la cotisation sociale pour financer la sécurité sociale, comme le suggère le président des libéraux flamands, revient à en faire supporter le coût par la population, en particulier par les revenus petits et moyens, à la place des entreprises. La diminution des cotisations sociales est la revendication principale du patronat soutenue par les libéraux. C’est pourquoi ceux-ci se sont acharnés à discréditer les cotisations sociales et ont imposé l’appellation de « charge sociale » pour ce qui n’est rien d’autre qu’un salaire indirect finançant les prestations sociales. La part des cotisations sociales dans le financement de la protection sociale qui s’élevait à 75% en 1995 a déjà chuté à 66%. À présent, la Vice-première ministre socialiste se rallie à la revendication libérale et propose une réduction à 50%. Les socialistes avaient joué un rôle moteur dans ce que l’on a appelé « le pacte social de 1944 ». Celui-ci avait conduit à la généralisation de la cotisation sociale et, pour les salariés, à la création d’un organisme unique de perception (ONSS). Le « nouveau pacte social » préconisé par Laurette Onkelinx est un « pacte social à l’envers » pour conforter les possédants. Il ne ferait que parachever le travail entamé par trente années de néolibéralisme. En ouvrant ainsi la boîte de pandore, la Vice-première ministre fait sauter les dernières digues de la protection sociale en agitant en compensation le mirage d’un hypothétique impôt sur le capital. En se ralliant en 2005 au « pacte de solidarité entre les générations », le PS avait connu un cuisant échec électoral. Comme l’avait fait naguère Laurette Onkelinx avec les enseignants, gageons qu’avec le « nouveau pacte social » le PS se couperait des milieux populaires qui ont constitué jusqu’ici sa base sociale et romprait sans doute ses attaches avec le mouvement syndical.