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Participation des travailleurs

C’est un des « grands chantiers » de la majorité arc-en-ciel. Ainsi, à la veille des vacances, le Conseil des ministre a approuvé l’avant-projet de loi devant permettre la PARTiCIPATION DES TRAVAILLEURS aux bénéfices ou au capital de leur entreprise. Par cette mesure nous nous engageons dans cette modernisation du capitalisme qui donne enfin la place qui leur revient aux actionnaires minoritaires parmi lesquels on pourra compter désormais les salariés eux-mêmes. Tout comme le font déjà les marchés, nous pourrons alors convenir qu’une entreprise est bien gérée selon qu’elle est bien cotée en bourse. La rémunération des ouvriers comme celle du PDG dépendront en conséquence de la valeur des actions assurant ainsi la convergence des intérêts dans une société enfin réconciliée avec elle-même sous l’égide du Dow Jones et du Nasdaq. Avec la popularisation de l’actionnariat, chaque individu sera enfin comme propriétaire. Les droits sociaux découlant de l’appartenance au salariat relèveront désormais d’un passé révolu. Ce ne sont plus les vieux droits du travail mais les droits patrimoniaux que devront défendre les syndicats modernes. Dans cette nouvelle société, tous les revenus des travailleurs, des rentiers, comme des retraités proviendront de la propriété et seront gérés par des fonds de pension, de salaire et d’épargne. Comme l’écrit André Orléan Libération du 28/08/200 , les individus seront liés entre eux « par le fait qu’ils sont tous propriétaires d’une partie du capital évalue par le marché ». Dans la société « de l’individualisme patrimonial », nous serons enfin débarrassés de la politique. Celle-ci sera rejetée, comme la philosophie et la religion, dans la sphère privé. L’espace public, enfin « dépolitisé », sera complètement voué au règne de la marchandise. « Le capitalisme, écrivait Cornélius Castoriadis, est obligé de solliciter constamment la participation des salariés au processus de production, participation qu’il tend par ailleurs lui-même à rendre impossible ». cité par Le Monde du 27/28 août 2000 En s’inscrivant tout entier dans l’utopie de « l’individualisme patrimonial », le capitalisme nouveau résout cette contradiction par l’élimination d’un de ces termes: les salariés. Pourtant, comme l’ont déjà expérimenté dans le passé les tentatives avortées de capitalisme populaire ou, à l’opposé, le socialisme bureaucratique d’Etat, tant que les uns travaillent au profit des autres, cette contradiction par l’élimination d’un de ses termes: les salariés. Pourtant, comme l’ont déjà expérimenté dans le passé les tentatives avortées de capitalisme populaire ou, à l’opposé, le socialisme bureaucratique d’Etat, tant que les uns travaillent au profit des autres, cette contradiction ne peut être abolie par des artifices juridiques qui ne font qu’exacerber l’exploitation tout en tentant de la dissimuler. N’est-ce pas précisément pour faire reconnaître des droits générés par le travail et non par la seule propriété que nos sociétés se sont données des enjeux collectifs? Pourquoi la fermeture d’une entreprise ou sa délocalisation suscitent-elles encore tant d’indignation, sinon parce que ces décisions obéissent aux seuls choix de ceux qui en détiennent la propriété et dénient de ce fait tout droit à ceux qui y travaillent? Or, dans la nouvelle société patrimoniale, le travail ne servira plus qu’à devenir propriétaire. Lorsqu’il ne restera plus aux salariés d’autre voie pour se faire entendre comme travailleurs que de faire sauter leur entreprise, polluer les fleuves et les rivières ou détruire l’environnement, gageons que les cours de la bourse baisseront aussi dangereusement. Alors peut-être sera-t-on amené à reconnaître que le travail peut également fonder des droits à l’origine de la citoyenneté?