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Van Cau, sa vie, son oeuvre !

La photographie de couverture montre Jean-Claude Van Cauwenberghe et son chien, un labrador noir nommé Baltique, ce qui était le nom, la race et la couleur du chien de François Mitterrand… À partir de là, on devrait se douter que ce qu’on tient en main est moins une biographie qu’une resucée wallonne d’un cérémonial de glorification nord coréen; ou, plus simplement écrit, d’une biographie de commande barbouillée par un porteur de baldaquin. Au deuxième degré, c’est parfois drôle ou picaresque, mais la densité de l’encens qu’exhalent tous les chapitres rend l’air difficilement respirable. La quatrième de couverture n’y va pas de main morte : «Une vie en forme de thriller politique», rien moins! Disons-le sans détour, au risque de vexer l’auteur, le versatile Michel Géoris Michel Géoris a commencé sa carrière auprès du syndicaliste André Renard. Il est ensuite devenu collaborateur au Pourquoi Pas? et fut un élu de l’éphémère UDRT, parti droito-poujadiste , sa prose est au thriller ce que le bunker est à l’architecture. Il y a tellement de clichés dans cette biographie qu’on se croirait dans une exposition de photographies… À force ça en devient affligeant car la trajectoire politique et personnelle de l’actuel ministre-président de la Région wallonne mérite plus d’attention, de ménagement et d’analyse. La «matière», comme on dit, permettait de tirer bien mieux que ces 250 pages d’eau tiède déversée sur nos têtes par un auteur dont la seule audace consiste à tenter de réhabiliter le style sirupeux et servile. Le livre est une caricature de ce que les anglo-saxons appellent le name-dropping, à savoir la recension méticuleuse de toutes les personnalités que l’on peut croiser au cours de son existence. On en éprouve jusqu’à l’étourdissement la sensation d’un inventaire de bric-à-brac et ça n’apprend strictement rien sur les événements et leur ressort, sur les choix et leurs conséquences. Ce sont des anecdotes, en bouquets, en gerbes et en massifs, relatées sur un mode édifiant et boursouflé, à la manière d’une épopée où Jean-Claude Van Cauwenberghe est tout à la fois le Roi Arthur, Merlin l’Enchanteur et la fée Viviane. On est en droit de se demander comment cette fine gâchette politique a eu la singulière idée de se faire tirer le portrait d’une aussi maladroite manière. On connaissait la célèbre exclamation d’Arthur Rimbaud: «O que ma quille éclate!». Il semble bien hélas que ce moment soit arrivé pour Jean-Claude Van Cauwenberghe.