Derrière un titre provocateur, une réalité bien plus provocante.

En 2024, où en sommes-nous au Proche-Orient ? Loin de la paix manifestement. Loin du dialogue aussi. Plutôt face à la peur, la violence et le deuil. Le dialogue israélo-palestinien fut pourtant possible à une époque, particulièrement en Belgique. C’est que ce pays d’Europe occidentale, à peine plus grand que les territoires de la Palestine mandataire à la veille de la fondation de l’État d’Israël, occupe une place à part sur la scène internationale, dans la recherche de la paix et du droit (Susskind). La petite Belgique est riche et multiple. Multiple par sa population, ses langues, ses religions, ses cultures. De telle sorte que ce que l’on refuserait de prendre en compte ici, d’un point de vue théorique, informatif, à Liège, Bruxelles, Gand ou Anvers, nous reviendrait néanmoins au visage, à l’esprit et au cœur, lié·es comme nous le sommes par des valeurs, des croyances, des espoirs, des tristesses, un passé et, nous l’espérons, un avenir, pour cette terre et surtout pour ses habitant·es.

Face à l’horreur, de quoi débattre ? Chaque humaniste accordera, à la suite de l’intellectuel palestinien Elias Sanbar, que «toute attaque contre des civils est un crime de guerre». L’objectif de ce dossier ne sera pas d’envisager des plans pour le présent ou l’avenir, ni de porter un jugement définitif et géopolitique sur la situation au Proche-Orient. Nous aimerions plutôt mettre en avant les analyses et témoignages qui soulignent comment et pourquoi la société belge se distingue de ses voisins (Mauzé), notamment par ses prises de positions diplomatiques dans le conflit, à l’avant poste – peut-être trop timoré, néanmoins? – de la défense du droit des Palestinien·nes (d’Othée). Nous avons également fait place à la prise de paroles situées, conjuguant deux identités, d’ici et de là-bas (Sheikh Hassan, Dima Daibes, Eitan Efrat), qui soulèvent les questions et éclairent d’une autre lumière ce qui semblait relever de l’évidence.

Comme le soulignent plusieurs auteurs, le problème de l’antisémitisme – dont la réalité s’observe de part et d’autre de la Méditerranée –, ne peut être évité dans ce dossier, tant son oubli, tout comme sa mobilisation, ont joué un rôle dans les engagements argumentatifs, les clivages politiques, et dans la vie quotidienne de la population belge face au conflit (Goldman, Perl et Guttmann). Aujourd’hui, l’espoir d’une coexistence fondée sur l’égalité et la justice dans la région est à l’image de la bande de Gaza : un champ de ruines. Qu’attendre dans ces conditions et que faire? De façon urgente, se battre pour un cessez-le-feu durable, de manière à assurer la prévention d’un génocide envers la population palestinienne, dont la Cour internationale de justice a averti du risque en début d’année 2024. Libérer également tous les otages et les personnes détenues illégalement. Aider à la construction d’un avenir meilleur… peut-être – nous l’espérons – ensuite.

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A l’attention de nos lecteurs et lectrices

Pour illustrer le dossier « Israël-Palestine. En quoi ça nous concerne », la rédaction a voulu représenter une carte de la Palestine mandataire, ou « historique ». La carte employée intégrait malheureusement le Golan syrien, annexé par Israël, lequel ne fait pas partie des territoires que revendiquent les Palestiniens.

La diffusion de la carte des autorités israéliennes valide sa politique du fait accompli, ce qui est bien entendu à l’opposé de la ligne éditoriale de la revue Politique. En dessinant le territoire allant du Jourdain à la Méditerranée sans y faire figurer de frontières, notre objectif est de représenter l’espace sur lequel les peuples israélien et palestinien n’ont d’autres choix que d’entrevoir un avenir commun, fondé sur l’égalité et la justice.

Rappelant que la défense de la cause palestinienne constitue l’une des balises de notre charte éditoriale, nous présentons nos excuses à celles et ceux qui se sont sentis offensés par cette méprise. Nous avons donc modifié la couverture sur le site internet de la revue Politique, ainsi que pour les emplois à venir et la diffusion.

Ce qui pourrait apparaître comme un épiphénomène montre au contraire qu’il demeure beaucoup à faire pour se prémunir de la propagande et faire pleinement droit à la parole palestinienne, afin de faire enfin aboutir politiquement une solution juste, dans le respect du droit.