Les balises de la revue Politique

La revue Politique porte un projet d’animation démocratique qui se manifeste de diverses façons : par l’imprimé, sur la toile, par des rencontres publiques. Mais ce projet est sous-tendu par un engagement politique. Les balises qui suivent cadrent cet engagement. Elles définissent un périmètre large dans lequel s’inscrivent ceux et celles qui souhaitent s’y associer.

Cet engagement n’est pas exclusif.  Les collaborateurs de Politique ont par ailleurs des engagements multiples, politiques ou associatifs, qui enrichissent leur expérience et leur réflexion propres. La diversité de ces engagements est une garantie de son indépendance et de son pluralisme.

Printemps 2017


Politique

Il est possible d’agir sur le destin des sociétés humaines. Politique souhaite y contribuer dans le champ des idées qui peuvent nourrir et éclairer l’action collective.

La politique – celle qui se déploie dans un champ particulier (partis, assemblées, gouvernements) qui a ses règles et ses rythmes propres (élections) – n’est pleinement légitime que si elle reste étroitement connectée avec le politique – celui des mouvements sociaux et des initiatives citoyennes – qui ne lui est pas subordonné.

Démocratie

Avant d’être un régime politique, la démocratie est une pratique permanente : faire en sorte que les êtres humains aient prise sur leur propre existence, qu’ils ne soient pas les jouets de forces qui les dépassent ni d’experts qui savent toujours mieux qu’eux-mêmes ce qui est bon pour eux. La crise universelle de la démocratie représentative ouvre un vaste chantier à explorer.

Le principal carburant de la démocratie, c’est le débat, la confrontation et l’hybridation des idées. Débat à promouvoir dans la société et, prioritairement pour ce qui concerne cette revue, au sein de la gauche, dont toutes les composantes doivent s’y sentir respectées.

Droits humains

La démocratie permet la manifestation de la souveraineté populaire, qui s’exprime à travers le principe majoritaire. Mais celui-ci a une limite : le respect sourcilleux des droits humains dont toute personne est titulaire. Aucune raison d’État, fut-elle mise en œuvre par un pouvoir démocratique s’appuyant sur l’opinion publique, ne peut s’autoriser à piétiner le droit des minorités, les libertés d’expression, d’opinion et de conviction ou le respect de la vie privée. Le maintien de l’ordre public et la lutte contre le terrorisme ne sont pas des arguments recevables pour justifier la limitation discrétionnaire de ces droits.

Gauche

La référence à une « gauche » s’opposant à une « droite » évoque des contenus différents selon les lieux et les époques. La palette est large, de Jaurès à Mao, de Blair à Besancenot. On comprend que, surtout dans les jeunes générations, tout le monde ne voit pas l’intérêt de s’accoler une étiquette souvent peu conforme au contenu du flacon. La gauche n’est pas un label de vertu. Si cette revue s’en réclame, c’est surtout par fidélité à une histoire séculaire, celle de l’émancipation du genre humain – des esclaves face à leurs maîtres, des colonisés face aux colonisateurs, des travailleurs face aux capitalistes –  et par engagement radical en faveur de l’égalité, en droit et en dignité, de tous et toutes.

Aujourd’hui, cette gauche-là est éclatée, dans l’espace de la politique, dans la société civile, sur le plan des aspirations et des idées. Elle résiste mal aux assauts de la mondialisation libérale et peine à donner corps à des alternatives désirables. Politique ne plaide pas pour une unité sans contenu de toutes les gauches. Les désaccords sont profonds et ils ont du sens. Mais cette revue souhaite contribuer à faire converger les énergies vers un horizon partagé, même si c’est par des chemins séparés, ou à tout le moins faire débattre et dialoguer.

Féminisme

« L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes » (Karl Marx, Friedrich Engels, 1847). Déclinaison féministe : « Ne me libère pas, je m’en charge ». L’exploitation économique de la force de travail par le Capital n’est pas la seule forme de domination qui s’exerce au sein de la société. La domination masculine sur la part féminine de l’humanité en est une autre que la gauche ne prend pas suffisamment en compte, quand elle ne l’a pas alimentée par le choix de ses priorités et par ses propres pratiques. À Politique, on n’oublie pas que cette domination s’exerce aussi dans le champ intellectuel, où elle se manifeste notamment à travers l’inégalité des prises de parole.

Antiracisme

La multiculturalité de nos sociétés n’est pas un choix, c’est un fait. Les flux migratoires ont bouleversé les identités nationales des anciennes métropoles et les obligent à intégrer dans la mémoire collective les récits propres à ses diverses composantes, dont le souvenir de la colonisation. En réaction, à côté d’anciennes formes de racisme toujours virulentes – antisémitisme, racisme anti-arabe « classique », antitsiganisme, négrophobie… – de nouvelles formes ont émergé, dont, au premier chef, l’islamophobie et l’hostilité franche à l’égard des réfugiés. Une « violence identitaire » vient ainsi se superposer à la violence du Capital et nourrir de nouveaux populismes.

Pour surmonter cette cassure, la gauche doit plus largement s’ouvrir aux nouvelles minorités ethnoculturelles qui font définitivement partie de « nous ». Si la société est inéluctablement multiculturelle, la gauche doit l’être aussi.

Écologie

Le progrès humain ne peut plus être pensé comme la redistribution équitable des fruits d’une croissance sans limite. Et pourtant, on continue à le rendre tributaire du gain d’un ou deux points de croissance, quoiqu’il en coûte pour la planète et les générations futures. Si « un autre monde est possible », plus équitable et plus respectueux des ressources humaines et naturelles, il faut pouvoir en donner un avant-goût dans l’aujourd’hui des revendications et des pratiques sociales.

Il n’y a pas à choisir entre les luttes écologiques et les luttes sociales. Aucun progrès d’un côté ne peut se traduire par une régression de l’autre. Les unes et les autres ne peuvent plus désormais se penser séparément.

Belgique, Europe

Politique s’écrit en français et s’adresse principalement aux francophones de Belgique. Ceux-ci sont insérés dans de multiples espaces politiques à investir : régional, communautaire mais aussi fédéral. Agir sur la Belgique implique un travail en commun avec les intellectuels flamands que nous ignorons trop.

Le sort de la société belge est étroitement lié à celui des pays voisins, avec lesquels on voudrait nous mettre en concurrence. Sur le plan des idées, les francophones  de Belgique restent encore largement tributaires de la France qui reste notre métropole culturelle pour le meilleur ou le pire. L’avenir de notre société – et de la gauche – ne peut s’envisager sans prise en compte du cadre européen et des solidarités qui doivent s’y nouer.

Monde

Dans le village mondial, tout agit sur tout. Mais certains conflits ont plus de résonance que d’autres dans notre société, notamment parce qu’une partie de notre population s’y trouve personnellement ou émotionnellement impliquée. C’est notamment le cas de la Palestine, qui subit depuis cinquante ans une occupation militaire du fait d’un État assimilé à l’Occident où notre responsabilité est directement engagée.

De ce monde complexe et cruel, on ne peut s’abstraire. Pour faire reculer l’injustice et la violence, il y a mieux à faire que de libéraliser encore plus la circulation des marchandises et des capitaux. Le minimum est de faire respecter partout le droit international et les droits humains fondamentaux.


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