Politique
Le jésuite des deux n’est pas le François qu’on pense
31.08.2015
Le sujet s’y prêtant, j’emploie ici le terme « jésuite » au sens de « dissimulé », « hypocrite », « retors ». Dieu me pardonnera, car à la question « de François Hollande ou du pape François, lequel des deux est un jésuite ? » je réponds sans hésiter : le Président français. Face à lui, le pape incarne le « parler-vrai ». Dans son encyclique sur le climat, le pape écrit que « l’échec des sommets mondiaux sur l’environnement » révèle « la soumission de la politique à la technologie et aux finances ». Il s’insurge contre « une conception magique du marché, qui suggèrerait que les problèmes peuvent être résolus simplement en augmentant les profits », et plaide pour qu’une « certaine décroissance dans quelques parties du monde » permette « une saine croissance en d’autres parties »[1.Voir aussi, dans ce numéro, juste les pages qui suivent…]. Ce texte contraste avec le rapport sur le climat pour la conférence des évêques européens, en 2008, qui exhortait les fidèles à la discipline, à l’humilité, et même à l’ascèse, dans une démarche dénuée de toute analyse sociale. Le pape François gêne pas mal de monde. Il vient d’inviter Naomi Klein à participer au Vatican à une conférence de haut niveau sur le climat. Les climato-sceptiques sont furieux. Quant à la curie romaine, gageons que tous ses membres ne sont pas enchantés d’accueillir à Rome une… femme… qui dénonce le capitalisme destructeur et productiviste. Et François Hollande, là-dedans ? Il a « formé le vœu » que la « voix particulière » du pape soit « entendue au-delà des seuls croyants ». J’ai envie de dire « Amen », tant ce vœu ruisselle d’hypocrisie. Une chose est en effet certaine : le sommet climatique que la France présidera, à la fin de l’année, battra tous les records de génuflexions devant la finance et de prières pour la croissance des profits. Hollande s’y est engagé personnellement. Penser que le pape François changera la nature de l’Église est sûrement trop optimiste, mais s’imaginer que le PS français fait encore partie de la gauche, ça, c’est vraiment du délire.