Retour aux articles →

Le message et la messagère

14 AOÛT 2019 : GRETA THUNBERG ANNONCE QU’ELLE SE RENDRA À L’ONU EN VOILIER

Le 14 août dernier, Greta Thunberg, la jeune militante qui a lancé les mouvements de grève scolaire en faveur du climat, annonce qu’elle se rendra au sommet de l’ONU à New York en voilier. Un trip qui ne sera pas 100 % zéro carbone. Il n’en fallait pas plus pour que les critiques fusent à l’encontre de la Suédoise de 16 ans, qui suscite déjà de nombreuses polémiques.

« Ce que vous ne savez pas sur le voyage de Greta », « La traversée de Greta Thunberg en voilier émet-elle plus de CO2 que si elle prenait l’avion ? », etc. Une rapide revue de presse vous permettra de réaliser très vite que ce voyage en bateau ne serait pas si écolo, et même qu’il serait, oh misère, un petit peu polluant malgré tout. Et lorsqu’on milite en faveur du climat, il semblerait que le zéro carbone, bien qu’impossible à réaliser, soit fondamental. C’est en substance le message ici véhiculé. Nous attendons d’ailleurs avec impatience qu’un calcul complet de l’empreinte carbone de la jeune fille soit réalisé. L’un ou l’autre journal devrait, sans doute, bientôt s’en charger, ce qui nous permettra de définitivement la clouer au pilori.

Greta Thunberg, aimée ou détestée, rappelle pourtant le sens de nos priorités sur les questions environnementales et climatiques. Entre l’Amazonie en proie aux flammes, la fonte des glaces qui s’accélère de façon frénétique, la destruction de notre biodiversité aux quatre coins du globe, nous pourrions penser que le message de Greta n’est pas complètement farfelu. Mais certains préfèrent rappeler que la jeune fille, souffrant du syndrome d’Asperger, serait de facto instrumentalisée par… par qui d’ailleurs, je n’ai pas encore totalement saisi.
Certains articles évoquent une « instrumentalisation du capitalisme vert » dont Greta serait la « marionnette ». D’autres se posent la question de la capacité de la jeune fille à être indépendante, parce qu’elle est jeune et, bien sûr, parce qu’elle est autiste.

Greta Thunberg, aimée ou détestée, rappelle en fait combien il est difficile de porter un combat et de le mener à bout de bras. Un combat qui n’est pourtant pas le sien mais celui de tous.

La médiasphère a, là aussi, un rôle fondamental à jouer pour nous le rappeler.
Pourtant, ces dernières semaines, j’en ai davantage appris sur les habitudes quotidiennes de la jeune fille que je n’en ai appris sur le fondement de ses actions. Un peu frustrée, je n’ai pas encore toutes les informations concernant son régime alimentaire, savoir si elle respecte la règle des 5 fruits et légumes par jour, et, évidemment, s’ils sont – ou non – issus de l’agriculture bio, sans quoi son engagement sera considéré comme nul et non avenu. Mais je reste patiente : l’un ou l’autre journal devrait aussi, sans doute, bientôt s’en charger.

Greta Thunberg, aimée ou détestée, rappelle que les médias doivent se remettre en question, dans leur capacité à informer sur la tragédie écologique qui est en cours.
Que la révolution que nous devons entamer pour notre survie passera aussi, inévitablement, par l’information qui nous est décortiquée et transmise. Qu’il ne faut pas tirer sur le messager, mais se rappeler les fondements du message : il n’y a pas le camp des climatosceptiques d’un côté, et les bobos écolos de l’autre mais une planète, la nôtre, qui fout le camp. La sauver passe aussi par l’encre de nos plumes.