Bosnie-Herzégovine
Bosnie-Herzégovine
Depuis le 26 février 2025, la Bosnie-Herzégovine est plongée dans une crise politique profonde. Cette crise a été déclenchée par la condamnation de Milorad Dodik, l’actuel président de la République serbe de Bosnie (Republika Srpska – RS), l’une des deux entités qui composent la Bosnie-Herzégovine. Dodik a été reconnu coupable par le parquet bosnien pour avoir délibérément ignoré les décisions de la Cour constitutionnelle du pays et celles du Haut Représentant international, chargé de superviser la mise en œuvre des accords de paix de Dayton qui ont mis fin à la guerre de Bosnie-Herzégovine en 1995. Cette condamnation a été suivie de l’émission de mandats d’arrêt contre Dodik et d’autres hauts responsables de la RS, tels que le Premier ministre et le président de l’Assemblée nationale de l’entité serbe. Ces événements ont provoqué une confrontation institutionnelle sans précédent entre la RS et l’État central de Bosnie-Herzégovine, remettant en cause le fonctionnement même du système judiciaire au sein de la RS. Cette situation réveille les tensions nationalistes serbes des années 1990, une période marquée par la guerre dévastatrice de 1992-1995.
La Bosnie-Herzégovine possède un système politique complexe, où chaque aspect de la gouvernance est divisé selon l’appartenance ethnique, ce qui a paradoxalement contribué à perpétuer les tensions entre groupes. Dans ce contexte institutionnel particulier, les partis politiques ethnonationalistes dominent la scène depuis la fin de la guerre. Milorad Dodik, lui, s’est imposé depuis 2006 comme le leader incontesté des Serbes de Bosnie. Après avoir initialement été perçu comme un réformateur, il a progressivement adopté un discours sécessionniste, prônant l’indépendance de la RS et mettant en péril l’existence même de la Bosnie-Herzégovine. Sa rhétorique s’appuie sur l’idée que la coexistence entre groupes ethniques est impossible en raison des tensions constantes concernant le partage des pouvoirs entre Banja Luka (le centre politique et économique de la RS) et Sarajevo (la capitale de l’État central). Il se présente comme le défenseur des Serbes, victimes selon lui des guerres passées, tout en niant ou minimisant les crimes de guerre commis par l’armée serbe de RS, notamment le génocide de Srebrenica. En réaction à sa condamnation et aux mandats d’arrêt émis contre lui et d’autres responsables, l’Assemblée nationale de la RS a voté des lois bloquant la juridiction des institutions centrales bosniennes sur son territoire, intensifiant la crise. Malgré ces mandats, Dodik a continué ses activités politiques et ses déplacements à l’étranger, notamment en Serbie auprès du président Vučić, en Israël et en Russie auprès de Vladimir Poutine, affichant un alignement avec des puissances contestant l’ordre occidental. Ces soutiens internationaux compliquent la situation et soulèvent des questions sur la capacité des autorités bosniennes à faire appliquer la loi.