La revue Politique et cinquante membres de la société civile lancent un appel en faveur de coalitions progressistes

A l’heure des discussions en vue des futures coalitions en Belgique francophone, des syndicalistes, des responsables d’organisations, des professeurs d’universités, des militant(e)s lancent un appel aux différentes nuances de la gauche.

(Cette carte blanche a été publiée dans le journal Le Soir du mardi 11 juin 2019)

Si le scrutin du 26 mai laisse un pays passablement divisé, le message des électeurs et électrices francophones est d’une clarté cristalline. Jamais, en effet, les Wallon·nes et Bruxellois·es n’ont porté les partis progressistes à de si hauts niveaux dans des assemblées régionales. Pourtant, en dépit de premiers contacts prometteurs entre PTB, PS et Ecolo, la conclusion d’un accord à gauche ne semble pas être le dénouement le plus probable.

Il ne sera pas question ici de juger de la pertinence des réserves exprimées par chaque parti à l’encontre de la constitution d’une coalition rouge-rouge-verte. Ni de cibler une formation particulière, chacune étant, à des degrés divers, traversée par des tensions quant à l’opportunité d’avancer vers un tel attelage. Reste que leur incapacité à s’entendre aura une conséquence très concrète en Région wallonne et en Fédération Wallonie-Bruxelles : le retour en force du MR.

Membres d’organisations de la société civile, de syndicats ou simples citoyen.ne.s, nous nous sommes mobilisés durant 5 ans contre la casse sociale, environnementale et démocratique conduite par la droite au sein du gouvernement fédéral. Nous ne saurions dès lors envisager sans réagir l’arrivée ou le maintien de celle-ci dans les entités fédérées, qui constituerait un affront majeur aux citoyen.ne.s qui les ont sanctionnés. Par conséquent, les partis qui n’auraient pas fait le nécessaire pour empêcher ce scénario porteraient une lourde responsabilité.

Un formidable rayon d’espérance

À l’inverse, la conclusion d’un accord de gouvernement mêlant les différentes nuances de la gauche, qui mettrait en œuvre des politiques fiscales, sociales et climatiques audacieuses en rupture franche avec l’austérité représenterait un formidable rayon d’espérance. Il permettrait d’expérimenter pour la première fois en Belgique ce que serait un gouvernement exclusivement composé des partis de gauche, comme d’autres ont pu le faire ailleurs en Europe.

Nous n’ignorons pas les divergences entre ces partis, mais elles ne nous semblent pas insurmontables, compte tenu de leurs nombreuses convergences programmatiques. Une telle alliance pourrait en outre prendre la forme d’un accord selon le modèle « portugais », le PTB apportant son appui externe à un programme de gouvernement progressiste constitué du binôme PS-Ecolo.

Pour finir, si la Wallonie et Bruxelles semblent temporairement vaccinés contre l’extrême droite, c’est entre autres, par la capacité des forces de gauche, chacune à sa manière, à présenter un récit alternatif au repli sur soi et à la haine. Leur échec à s’entendre ne saurait qu’affaiblir ceux qui cherchent à opposer un contre-discours positif à la pensée unique néolibérale. À l’inverse, quel meilleur antidote au fascisme rampant que la mise en place de politiques à même de tourner la page du «There is no alternative» là où PS, Ecolo et PTB travailleraient ensemble pour ce faire ?

SIGNATAIRES :

Revue Politique (initiatrice de l’appel), Mateo Alaluf (sociologue), Serge Bagamboula (Coordination des travailleurs avec et sans papiers de la CSC), Pierre Baldewyns (Service Promotion Santé de Solidaris), Patrick Bebi (metteur en scène), François Bertrand (chercheur au centre d’études sur le sans-abrisme « La Strada ») Thierry Bodson (secrétaire général de l’Interrégionale wallonne de la FGTB), Arthur Borriello (chercheur en sciences politiques ULB), Farida Boujraf (psychologue), Mustapha Chaïri (militant antiraciste et citoyen engagé), Julien Charles (coordinateur de recherches au CESEP et chargé de cours invité à l’UCL), Natalia Claasen (responsable de la régionale bruxelloise du Mouvement Demain), Adriana Costa Santos (co-présidente de la plateforme citoyenne d’accueil des réfugié-e-s), Sarah de Liamchine & Denis Dargent (co-directrice & co-directeur de Présence et Action culturelles), Robin Delobel (chargé de projets au CADTM), Edouard Delruelle (professeur de philosophie politique à l’ULiège), Alexis Deswaef (co-président de la plateforme citoyenne d’accueil des réfugié-e-s), Julien Dohet (FGTB-Setca Liège & collectif Le Ressort), Josy Dubié (sénateur honoraire), Fanny Dubois (secrétaire générale de la Fédération des maisons médicales), Vincent Engel (écrivain), Pierre Eyben (co-porte-parole du Mouvement Demain), Sebastian Franco (Altersummit), Catherine François (militante CGSP), Seyma Gelen (militante féministe), Marie Gobert (gilet jaune), Tom Goldschmidt (journaliste), José Gotovitch (professeur honoraire de l’ULB), Serge Govaert (secrétaire général honoraire du Parlement bruxellois), Guillaume Grignard (doctorant en sciences politiques à l’ULB), Chahr Hadji (travailleur social et militant), Maryse Hendrix (présidente du Conseil wallon de l’égalité entre hommes et femmes), Marc Jacquemain (professeur à l’ULiège), Mehdi Kassou (militant pour les droits humains), Irène Kaufer (militante féministe), Jean-Pascal Labille (secrétaire général de Solidaris), Françoise Lalande (écrivaine), Jérôme Lechien (médecin engagé), Paul Lootens (ancien président de la Centrale générale FGTB), Anne Lowenthal (militante et polémiste), Renaud Maes (professeur à l’Université de Saint-Louis), Céline Moreau (formatrice au Cepag), Serge Noël (SOS Migrants), Christine Pagnoule (professeur honoraire de l’ULiège et porte-parole d’Attac Wallonie-Bruxelles), Irène Pêtre (permanente nationale de la CNE retraitée), Jean-Marie Piemme (auteur), Michael Privot (directeur d’Enar), Andrea Rea (professeur à l’ULB), Maxime Ramirez (responsable de la régionale bruxelloise du Mouvement Demain), Daniel Richard (secrétaire régional interprofessionnel de la FGTB Verviers & Communauté germanophone), Michel Roland (médecin), Marc Sinnaeve (chargé de cours à l’Ihecs), Olivier Starquit (auteur et membre du collectif Le Ressort), Carmelo Sutera (président de la CNAPD), Jean-François Tamellini (secrétaire fédéral de la FGTB), Corinne Torrekens (professeure de sciences politiques à l’ULB), Stéphane Vanden Eede (citoyen climatique) Felipe Van Keirsbilck (secrétaire général de la CNE), Mathieu Verhaegen (président de la CGSP-ALR-BRU), Brieuc Wathelet (TAM TAM) et Irene Zeilinger (militante féministe).