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Une expérience enrichissante

‘‘ Ce soir, le Café Carabosse accueille une femme particulièrement courageuse : la députée Carla Lejeune qui a décidé de vivre, durant un mois entier, dans les conditions d’une famille monoparentale. Alors Carla, racontez-nous cette incroyable plongée dans les entrailles de notre société : d’abord, pourquoi cette expérience ?

  • En tant que représentante du peuple, je suis amenée à voter des mesures dont, à vrai dire, j’ignore tout des conséquences sur la population. En tant que femme, en tant que mère, je voulais savoir ce que vivent vraiment ces femmes, et le faire savoir à mes collègues. Alors voilà : j’ai échangé ma vie avec l’une d’elles, durant un mois entier. Dans son appartement, avec son frigo, ses allocations de chômage, sa recherche d’emploi, sa pension alimentaire impayée. J’ai juste gardé mes enfants. Pendant ce temps, elle me remplace au Parlement.

Malgré le froid et la fatigue, vous vous obligez à tenir un blog quotidien, que vous avez intitulé « Une expérience enrichissante ». Quand on vit avec quelque 200 euros par mois, une fois déduits les frais fixes, c’est un titre un peu provocateur, non ?

  • Pas du tout ! C’est enrichissant, je le pense vraiment ! D’abord, ça permet de découvrir la vraie vie des vraies gens : y en a-t-il parmi vous qui ont déjà goûté le yaourt premier prix de chez L***** ? Ah bon, la plupart d’entre vous ? D’accord, c’est dégueulasse, mais il faut avoir essayé au moins une fois dans sa vie !

Vous avez choisi de noter les bons côtés de votre situation…

  • En effet, j’ai vécu des moments inoubliables. Refuser des bonbons à mon fils avec un air accablé, parce que maman n’a pas les moyens ; dire aux copines : ah non, désolée, je n’ai pas de quoi vous accompagner au théâtre… et éviter la pièce super prétentieuse où on se prend la tête ; pouvoir décliner une offre d’emploi sous-payée au nez et à la barbe d’un employeur libidineux, juste parce qu’on n’a pas de solution pour faire garder les enfants : waouw !

Mais vous risquez alors une sanction du chômage…

  • Ah bon, vous croyez… ? Bah, si ça arrive, mon expérience sera déjà terminée !

Vous avez d’autres projets ?

  • En 2014, j’ai déjà plusieurs rendez-vous ! Une semaine en fauteuil roulant, suivie de trois jours en musulmane voilée cherchant un emploi, et enfin l’apothéose, une nuit en gay noir et aveugle dans une bulle transparente au centre de Bruxelles, histoire de sensibiliser la population à… eh bien… au sort de la population. Les gens ne se rendent pas compte – même si je ne sais pas bien de quoi !

Mais vous savez ce que fait votre partenaire, pendant ce temps ?

  • Aucune idée. Pas d’argent pour me payer la télé ou Internet…

Eh bien ! Elle a profité de son passage comme députée pour déposer un projet de loi révolutionnaire, remontant tous les revenus de remplacement au-dessus du seuil de pauvreté, supprimant la dégressivité des allocations du chômage…. Et elle a su être tellement convaincante que son projet a été adopté, avec une majorité écrasante et une standing ovation !

  • Bon, je vois qu’il est temps que je reprenne ma place… En attendant, quelqu’une veut bien me payer une bière ? Parce qu’avec 200 euros par mois…

••• Toute ressemblance serait purement volontaire avec :  d’une part la députée bruxelloise Carla De Jonghe qui a décidé de vivre un mois avec 180 euros, pour comprendre ce que ça fait d’être pauvre. Elle publie son expérience sur un blog (http://www.carladejonghe.be) ;  d’autre part l’opération de la RTBF « Viva for Life » où trois animateurs/trices de Vivacité se sont enfermés dans une bulle transparente à Liège durant 6 jours pour une émission spéciale en direct avec des stars et des défis à relever, « au profit de la pauvreté infantile », comme dit la pub elle-même.