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Comment atteindre la paix en Ukraine ? (3/4)

(Javardh. unsplash)
(Javardh. unsplash)

Créer les conditions d’une désescalade. Réponse de Gregory Mauzé à Laurent Vogel

Comme tout conflit, la guerre en Ukraine possède plusieurs niveaux de lecture. Les velléités prédatrices du régime russe vis-à-vis de son étranger proche sont une réalité, mais les menaces sécuritaires qu’ont historiquement fait peser les forces de l’OTAN sur la Russie postsoviétique le sont tout autant. Ne pointer que les premières, en ignorant les secondes, produit une vision du monde manichéenne particulièrement accommodante pour notre camp euro-atlantique. De manière ironique, cette lecture unifactorielle du conflit, attribuant toutes les fautes à la Russie, fait écho à celle, tout aussi réductrice, qui fait de Washington la source unique de l’ensemble des désordres planétaires.

Si le régime russe pose aujourd’hui une question de vie ou de mort pour l’Ukraine, l’impérialisme de nos propres gouvernements ne doit pas pour autant être occulté. Il transparaît notamment dans l’Accord d’association UE-Ukraine de 2014 et dans les plans du FMI imposés à Kiev en 2020. Tous deux visent des objectifs similaires : d’une part, concurrencer les oligarques locaux et russes dans l’entreprise de pillage des ressources du pays ; d’autre part, en faire un réservoir de main-d’œuvre à bas coût. Faire en sorte que l’Ukraine cesse d’être l’otage de l’appétit des puissances étrangères constitue la condition même de la réalisation de son droit à s’autodéterminer librement.

Plutôt que de poursuivre un débat historique que l’on ne saurait trancher ici, j’aimerais te poser cette question, Laurent : ne faudrait- il pas rassembler tous ceux qui s’accordent pour défendre l’intégrité territoriale et l’existence en tant que peuple, des Ukrainien·nes, indépendamment de leur analyse du conflit ? Le Resu, dont tu es membre, a raison d’attirer l’attention sur de possibles angles morts du mouvement pour la paix et d’œuvrer au dialogue entre progressistes belges et ukrainiens. Pour que celui-ci soit fécond, il convient néanmoins de reconnaître la légitimité des prémices éthiques des différents positionnements, à gauche, sur ce sujet. On peut en effet tout à la fois chercher à apporter un soutien concret au peuple ukrainien (lequel ne se résume pas aux fournitures militaires) tout en considérant que la meilleure façon de le faire est de créer les conditions d’une désescalade. Il serait regrettable de forcer nos concitoyen·nes à choisir entre la paix et la solidarité avec les Ukrainien·nes.