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Crise à la Fef : un air de déjà-vu

La désaffiliation récente du bureau des étudiants administrateurs (BEA) de l’ULB de la Fédération des étudiants francophones (Fef) a fait les gros titres de la presse tout début novembre. Pourtant, ce retrait n’est pas une première. Il y a dix ans, l’institution avait connu une situation analogue, à la différence près que c’était cette fois l’Assemblée générale des étudiants de Louvain (AGL) qui avait claqué la porte avec fracas.
Les raisons évoquées en 2011 – une gestion trop verticale, une mauvaise représentation des différents conseils étudiants fédérés, une connaissance défaillante du « fond » des dossiers – ressemblent de manière troublante à celles évoquées par le BEA en 2021[1.On peut comparer les deux communiqués, celui de l’AGL en 2011 « L’AGL quitte une Fef en laquelle elle ne se reconnaît plus » et celui de l’ULB en 2021 « Le BEA se désaffilie de la Fef ».]. Seule différence marquante : au début des années 2010, l’AGL pointait aussi le trop grand « militantisme » et la politisation des instances fédérales. Visés (mais pas cités dans leur communiqué) les étudiants du Comac, les jeunesses politiques du PTB, et ses différentes listes étudiantes. Au cours des années suivantes, la presse se fera régulièrement l’écho d’un « entrisme » supposé de l’extrême gauche au sein de la Fef.

Cette énième crise de la représentation étudiante intervient en tout cas dans un contexte d’écroulement du système des Organisations représentatives communautaires (ORC) mis en place en 2003. Le rôle des ORC a été défini de manière très lâche par la Communauté française comme un système de représentation indirect, constitué de conseils étudiants affiliés, devant défendre les intérêts des étudiants et servir d’interface avec le monde politique. Elles se voient pour cela accorder un certain nombre de moyens. Les critères de reconnaissance des ORC sont en revanche bien plus stricts et nécessitent un certain « taux de représentativité » des universités, des hautes écoles et des écoles d’arts[2.Lire le « Décret relatif à la participation et la représentation étudiante dans l’enseignement supérieur » de 2012 qui actualise le « Décret définissant et organisant la participation des étudiants au sein des institutions universitaires et instaurant la participation des étudiants au niveau communautaire » de 2003.]. Seules deux ORC ont été reconnues depuis leur création, la Fef et l’Union des étudiants de la Communauté française (Unecof). Celle-ci, fondée déjà suite à une initiative du BEA en 1996, s’était positionnée dans les années 2010 comme une fédération « apolitique », pour ne pas dire plus ouvertement à droite. Or, elle a perdu sa reconnaissance en 2019, laissant pour unique choix aux conseils étudiants de s’affilier à la Fef ou de rester indépendants.

Depuis la disparition de l’Unecof, une réflexion semble s’être ouverte, à la fois au sein du monde politique et étudiant, sur une réforme du système de la représentation.

Plusieurs options sont avancées, de la simple révision des critères de représentativité, pour permettre à de nouvelles ORC de voir le jour, à la révolution copernicienne de l’affiliation directe des étudiants aux fédérations. L’Union syndicale étudiante (USE), membres des Jeunes FGTB, milite depuis des années pour cette option qui ferait primer le syndicalisme étudiant sur un système de cogestion administratif.

Se pose en tout cas la question du rôle de la représentation étudiante : doit-elle participer aux instances, comme l’Académie de recherche et d’enseignement supérieur (Arès), avec les autorités académiques, au risque de demeurer dans une logique de consultation et de lobbying ou privilégier un lien direct avec les étudiants, par des affiliations individuelles et des assemblées hors conseils étudiants, au risque cette fois de réduire drastiquement leur « base » de représentation ?

Le débat est ouvert.