Retour aux articles →

La coupe (du monde) est pleine

— En ce beau mois de juin, bienvenue en Afrique du Sud, ses townships misérables à l’ombre de stades rutilants, ses centaines de joueurs, ses centaines de milliers de supporters… et ses dizaines de milliers de prostituées, importées pour l’occasion ! Vive la Coupe du Monde de football et ses bordels géants ! — Le tourisme sexuel, voilà au moins une activité en plein boom ! Comme j’ai l’esprit scientifique, je me suis livrée à un petit calcul. Le gouvernement sud-africain prévoit d’importer un milliard de préservatifs supplémentaires. Un milliard! Faites le compte : cela fait 2000 pour chacun des 500 000 visiteurs attendus, en comptant femmes et enfants ! Mais quand auront-ils le temps de voir un match ? — Cela fait aussi 20 000 pour chacune des 50 000 prostituées. Quel rythme ! — C’est à chaque fois pareil : n’importe quel rassemblement de mâles, que ce soit pour jouer à la baballe, pour faire la guerre ou pour assurer la paix, et il faut garnir les bordels de campagne ! Alors, qu’on soit «légaliste» ou «abolitionniste», qu’on pense que la prostitution est une violence absolue ou qu’elle est une activité comme une autre lorsqu’elle est librement choisie, une chose est sûre : quand il s’agit de recruter des dizaines de milliers de proies d’un coup, le trafic de femmes est sûrement plus efficace que les petites annonces ! — Il y en a qui préfèrent quand même l’artisanat, comme ces joueurs français lâchement piégés par une fille qui ne les a pas prévenus qu’elle était mineure Allusion à «l’affaire Ribéry» bien sûr, ce joueur du Bayern Munich qui s’est fait offrir une prostituée pour son anniversaire… et qui risque de gros ennuis parce que son «cadeau» n’avait pas 18 ans. Et aux médias qui ont répété à l’envi que le malheureux avait été «piégé» par cette fille…….. Par sa faute, ils risquent leur mariage, leur réputation, leur carrière, qui sait ! Les pauvres ! — Oui, il faut lire le contraste entre d’un côté la présentation de ces filles, des écervelées assoiffées d’argent et de célébrité, et de l’autre ces «sportifs de haut niveau» qui ont une vie si dure et des besoins si particuliers «Sport, sexe et scandales», Télémoustique, 5 mai 2010… — Stop ! J’en ai marre qu’on parle de «sportifs de haut niveau», alors qu’il s’agit avant tout de «sportifs mâles» ! On imagine mal Justine Henin ou Tia Hellebaut, pourtant de grandes sportives elles aussi, se payer (ou se faire payer) un gigolo pour décompresser après un entraînement particulièrement dur ou un match stressant ! — L’écrivaine Agnès Maillard s’est amusée, justement, à retourner la situation, dans un texte incisif où elle revendique les besoins particuliers de… femmes créatrices. Je vous lis un extrait : «Nous, les femmes de lettres, nous sommes puissantes, imaginatives, en pleine possession de nos moyens et nous avons de gros besoins sexuels pour alimenter notre art. (…) Je paye un mec pour les satisfaire et m’épargner les complications. Pas envie de perdre mon temps avec des phases d’approche, pas envie de m’emmerder à penser à plaire, à séduire, pas besoin d’aller m’épiler, de penser à ce que je vais mettre, à ce que je vais dire, de me faire chier à être sympa ou vaguement baisable. Je peux être nulle, médiocre, puer du bec ou de la moule, je n’ai aucun effort à faire, il me suffit de sortir le fric…» Pourquoi ça paraît si bizarre dans ce sens-là… ?