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D’autres voix en Flandre

(CC BY-ND 2.0 – photo prise au festival WebTV, mars 2012, par Jérôme Salles.)
(CC BY-ND 2.0 – photo prise au festival WebTV, mars 2012, par Jérôme Salles.) © SALLES Jerome

Voyage à travers des sites flamands alternatifs, à l’usage des francophones un peu bilingues et désireux de sortir des clichés.

Cet article a paru dans le n°111 de Politique (mars 2020)

Dans ce dossier de la revue Politique, le lecteur aura une vue synthétique des voix critiques progressistes flamandes qui font face à l’extrême droite en Flandre. Et encore : on n’a pas pu tout y mettre. En effet, bien que la situation soit préoccupante, il y a en Belgique néerlandophone une vaste et solide militance à gauche qui ne se laisse pas décourager par l’actuel tsunami politique d’extrême droite…

À côté de la militance individuelle, et de l’engagement de nombreuses associations de la société civile, on peut compter sur un grand nombre de médias progressistes et alternatifs qui sont pour la plupart inconnus des francophones. Eh oui : la Flandre médiatique ne se réduit pas à De Standaard ou à De Morgen, à la VRT ou à VTM. On ne s’en étonnera pas : le web a joué un rôle important dans le développement de ces nouvelles initiatives progressistes. Visite guidée.

Commençons par une des initiatives les plus récentes : Lava comprend un site web (lavamedia.be) et une revue qui donnent la parole à des auteurs belges ou étrangers qui « pensent en dehors des lignes », avec l’objectif ambitieux de devenir un espace de rencontre privilégié de la pensée de gauche. De tendance marxiste, c’est une initiative bilingue.

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Lava

Uitpers (uitpers.be) fut le pionnier des médias web progressistes en Flandre. Il a été créé en 1999 en réaction à la banalisation des informations internationales dans les médias traditionnels. Depuis 20 ans, Uitpers continue à délivrer une vision progressiste (analyses, opinions, contextes) sur ce qui se passe dans le monde.

Samenleving en Politiek (sampol.be) – « Société et politique » –, est un mensuel portant un regard critique sur les problèmes politiques et sociaux à partir de son engagement pour une démocratie sociale. Ce périodique existe depuis 1994 et livre des analyses approfondies, des interviews, des recensions d’ouvrages. S’y exprime une palette large d’auteurs, de chercheurs et de politiques belges ou étrangers. Le site web reprend les articles de la revue qui sont en consultation libre.

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Sampol

MO* (mo.be) est un projet médiatique sur « les tendances mondiales et les réalités locales partout sur la planète ». La mondialisation, la migration, le climat, les droits humains y font l’objet d’analyses, d’opinions, de reportages, d’interviews. Ainsi, MO* met à disposition des Flamands de l’information pertinente sur cet autre monde, le tiers-monde, qui, dans les grands médias, n’est traité que de façon stéréotypée et superficielle.

Du côté de l’édition, une seule maison d’édition progressiste en néerlandais (Pays-Bas inclus) a subsisté. Créée en 1975 comme maison d’édition bilingue sous le nom d’Éducation Prolétarienne/ Proletarische Opvoeding, EPO, et installée à Anvers, elle n’a conservé que l’édition en néerlandais. À côté d’auteurs flamands – dont certains ont écrit dans ce dossier de Politique –, EPO publie également des auteurs francophones belges et des auteurs internationaux comme Noam Chomsky et Howard Zinn. EPO est également l’actionnaire majoritaire de l’excellente librairie progressiste De Groene Waterman à Anvers, où des auteurs belges et étrangers sont régulièrement invités à présenter leurs ouvrages.

Le collectif de journalistes DeWereldMorgen (www.dewereldmorgen.be) a été créé en mars 2010 comme successeur du site disparu Indymedia. Ce site web se concentre sur l’actualité avec des articles et des vidéos. DeWereldMorgen veut être une réponse à la crise mondiale des médias. Ceux-ci sont mis en question : commerciaux, trop superficiels, trop portés sur l’esbroufe. À côté des cinq journalistes de la rédaction permanente, des centaines de journalistes citoyens y collaborent. C’est là que je travaille. DeWereldMorgen aborde des thèmes qui ne sont pas repris par les médias ordinaires ou qui y font l’objet d’un traitement expéditif. Il n’apporte pas des images sensationnelles et vides de sens à propos des luttes sociales, mais bien une information qui aide à comprendre ces luttes pour pouvoir se former son propre jugement. Quel est l’objet de l’action ? Qu’est-ce qui l’a précédée ? Quelles sont les revendications avancées ? Quelles sont les conditions de travail actuelles ? Pendant combien de temps les travailleurs ont-ils négocié avant de passer à l’action ? Grâce à son intérêt pour l’autre information, DeWereldMorgen aborde des sujets qui ne seront repris que bien plus tard par les grands médias. Ainsi, notre rédaction a sonné l’alerte à propos de Schild & Vrienden et de son leader, un an avant le reportage désormais bien connu de la télévision publique VRT.

DeWereldMorgen est largement ouvert à de nouvelles collaborations. Parmi elles, de nombreuses personnes ont pu se faire connaître et publient dans la presse mainstream. DeWereldMorgen suit aussi de près l’actualité internationale et met à la disposition de ses lecteurs des articles publiés dans la presse alternative du monde anglo-saxon, francophone et hispanophone. En outre, beaucoup de Flamands vivant à l’étranger nous servent de correspondants en nous donnant accès à des informations négligées par les grandes agences de presse internationales.

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De wereld morgen

Par ailleurs, de nombreuses ONG flamandes disposent de leur propre site web et de leurs propres publications. Elles nous parlent de culture, de migration, du monde bancaire, du tiers-monde, de la solidarité internationale et de bien d’autres sujets.

Mon souhait, avec cette introduction aux autres voix en Flandre, est d’encourager les lecteurs francophones à faire plus amplement connaissance avec la Flandre progressiste. Nous avons bien plus en commun que ce que nous pensons. Puisse ce dossier être un encouragement à plus de collaboration, à plus d’échange d’idées et au rassemblement de nos
forces.

Traduction : Jean-Paul Gailly.

(Image de la vignette et au début de l’article sous  CC BY-ND 2.0 ; photo prise au festival WebTV, prise en mars 2012, par Jérôme Salles.)