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Être à la hauteur de l’Histoire – édito n°125

@ajcolores. Unsplash
@ajcolores. Unsplash

Nul besoin d’être un théologien chrétien ou un marxiste dogmatique pour le reconnaître : l’histoire se fait, et elle a au moins le sens que nous lui accordons. Si les querelles au sein des partis politiques belges et les petites phrases parsèment les colonnes des journaux et les réseaux sociaux, leur accroissement semble proportionnellement inverse à l’intérêt que les citoyen·nes leur portent.

Des règlements de compte à O.K. Corral entre François De Smet et Olivier Maingain, pour un parti dont le nom semble parfois en résumer la substance (Défi), à l’énième déclaration farfelue du président des conservateurs (MR) au sujet d’une ASBL molenbeekoise qui serait riche à millions… difficile de considérer ces événements autrement que comme un épiphénomène – au mieux un symptôme – face aux mouvements telluriques qui bouleversent les sociétés humaines.

La Belgique serait-elle un empire dans un empire, à ce point isolée que le reste du monde ne la concernerait pas? Qui soutiendrait une telle opinion? Fatiguée de se voir trop souvent présenter le petit bout de la lorgnette, la mission de Politique, revue bel et bien belge, paraît donc évidente. Faire le lien avec le monde, penser la grande et la petite histoire, unies plutôt que séparées.

La Belgique serait-elle un empire dans un empire, à ce point isolée que le reste du monde ne la concernerait pas ?

Parfaitement incomplète, certainement engagée, la revue continue donc sur sa lancée, fidèle à ses ambitions originelles : être à la hauteur de l’Histoire. Voilà pourquoi il nous a paru essentiel d’aborder à nouveau le sujet de la guerre menée par la Russie en Ukraine. C’est aussi la raison pour laquelle, pour la première fois depuis sa création en 1997, la revue a pour dossier principal le rapport de la société belge à la cause palestinienne.

Dans ce numéro, la question économique, fondamentale, n’est évidemment pas laissée de côté, avec un article du sociologue Daniel Zamora, analysant comment la lame de fond du néolibéralisme a pu toucher le «modèle belge ». La régulation des émissions de CO2, la présence des religions dans l’enseignement, ces sujets représentent aussi des enjeux qui animent et dépassent le cadre de la Belgique et lient notre pays à la marche du monde.

Bien entendu, consacrer pour la première fois en vingt-cinq ans d’existence, un dossier principal de la revue Politique à l’écho de la guerre à Gaza, ne va pas sans risques. Celui de heurter, de déranger, de s’opposer et d’affirmer. Bousculer les certitudes, nourrir, en un même mouvement, le doute et les convictions : quoi de plus nécessaire face au silence et au sommeil de la raison qui, comme l’avait noté Goya, engendre des monstres? Voilà certainement un engagement nécessaire et difficile, en un temps qui ne l’est pas moins.