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« On ne vise pas principalement la RTBF »

Une émission de télévision qui se transforme en affaire d’État : un point ultra-sensible a été touché. Dans sa grande masse, l’opinion publique, relayée par le personnel politique unanime, témoigne qu’elle n’a pas seulement été choquée (de cela, on se remet), mais surtout qu’elle enrage d’avoir été manipulée par une émission racoleuse. Mais elle ne témoigne pas que de cela. Elle signifie aussi qu’elle a été blessée dans ses sentiments profonds. Car la même technique appliquée, par exemple, à une fausse catastrophe nucléaire destinée à faire réfléchir le public sur les dangers de l’atome n’aurait pas mobilisé de tels affects. Ces dernières années, la Belgique et ses attributs, dont la monarchie, sont revenus en force dans le dispositif identitaire qui charpente l’inconscient collectif des francophones. Il est loin le temps du fédéralisme adulte qui était l’horizon de l’opinion progressiste il y a un demi-siècle, quand elle était capable de se projeter dans l’avenir. Même s’il y a de bonnes raisons d’être attaché à la Belgique multiculturelle en tant que laboratoire d’une Europe ouverte sur le monde, cela n’a rien à voir avec ce belgicanisme frileux qui s’est imposé à la Wallonie comme paratonnerre pour conjurer la peur du lendemain. C’est aussi cette peur panique que l’émission a mise en lumière. Serons-nous encore capables de reprendre demain — car on n’y échappera pas — le débat institutionnel autrement que sur le mode du film catastrophe ? Et ici, on ne vise pas principalement la RTBF.