C’est avec une infinie tristesse que nous avons appris la disparition de Pierre Ansay, ce lundi 3 octobre 2022, le jour même où il nous a fait une nouvelle fois l’honneur et le plaisir de nous retrouver pour causer politique, tel un au revoir avant de rejoindre son idole et ami philosophique de toujours, Baruch Spinoza.

Pierre Ansay a commencé à écrire pour Politique en 2007 et a été très prolifique dans les textes et les analyses proposées à la revue. Nous vous proposons de plonger dans quelques uns de ses textes dans cette édition spéciale en ligne de la rubrique « Une Œuvre » – qui consiste à présenter la pensée d’un auteur ou d’une autrice au travers de son travail, une rubrique dans laquelle Pierre a beaucoup écrit.

  • Aristote nous parle-t-il encore aujourd’hui ? (n°120) : Pourquoi relire, ou à tout le moins, s’inspirer de la pensée encyclopédique du philosophe antique en 2022 ? Peut-être parce qu’il est parvenu à mettre le doigt sur l’importance du bien en politique, c’est-à-dire l’organisation de la vie dans la cité. Plus précisément, le bien vivre ensemble, qui est au cœur de ses écrits et qui résonne aujourd’hui dans le débat entre les visions communautarienne et libérale de la politique.
  • Machiavel et la politique : la force des armes et les armes de la force (n°116) : Pour gouverner en temps d’incertitudes, quel meilleur conseiller politique que Machiavel ? Cet auteur a traversé les époques pour donner son nom au machiavélisme. Pourtant, le sens de son œuvre est plus complexe. En développant une vision pragmatique du pouvoir, il repense la relation entre l’éthique et le politique, et il dissocie le politique du christianisme. Véritable défenseur de la république, sans recourir à une hypothétique vertu citoyenne, Machiavel appelle à gouverner à partir de la réalité.
  • Val Plumwood, le crocodile, l’écoféminisme et le care : Val Plumwood, (1939-2008), militante et philosophe écoféministe australienne, a consacré de nombreux travaux à l’anthropocentrisme. Son œuvre est marquée par une lutte constante contre l’hyper-séparation entre les humains et le reste de la nature. Cette lutte est très politique car elle vise également à dénoncer la séparation entre d’une part les hommes blancs diplômés et de l’autre les femmes, les enfants, les personnes âgées, les peuples autochtones et les animaux non-humains. Peu connue dans l’univers francophone, la publication de Feminism and the Mastery of Nature et Environmental Culture : The Ecological Crisis of Reason a fait d’elle une des penseuses les plus brillantes de notre époque.
  • La société sans répit : la mobilité comme injonction : Le sous-titre de cet essai l’annonce et le résume : la mobilité comme injonction. Les deux auteurs, Christophe Mincke et Bertrand Montulet, ont produit là une remarquable synthèse de diverses analyses sociétales relatives à la bougeotte imposée.
  • Sophie Heine et les stéréotypes justifiant les dominations : Dans cet essai, l’auteure explore la manière dont certains stéréotypes sur le genre sont utilisés pour justifier les dominations qui affectent les femmes, processus des plus ordinaires aux plus extrêmes, des concours de beauté aux violences physiques et harcèlements.
  • Karl Polanyi, la grande transformation (n°110) : Karl Polanyi (1866-1964) est un économiste hongrois, l’un des fondateurs de l’anthropologie économique. Son œuvre majeure, La grande transformation1, est parue en 1944 et, vu l’époque, n’a pas connu un succès immédiat. À côté de cet ouvrage majeur, il a publié un grand nombre d’articles situés à la croisée de plusieurs sciences humaines : philosophie, histoire, économie et anthropologie. Son œuvre élabore une critique vigoureuse de la pseudo-universalité de l’homo oeconomicus et constitue un vigoureux plaidoyer pour le socialisme démocratique et la liberté dans une société complexe.
  • Gilles Deleuze, vie et résistance (n°90) : Gilles Deleuze (1925-1995) est un des penseurs majeurs du XXe siècle. Son oeuvre cible les dispositifs et les machines de savoir et de pouvoir qui empêchent l’expansion de la vie. Il se livre pour cette avancée à une reprise critique des propositions et analyses de ses deux illustres prédécesseurs, Marx et Freud. Analyste de la force du capitalisme et de sa séduction, son œuvre, imprégnée par la réaction qui suivit mai 1968, échoue à proposer une alternative politique globale : tout est toujours à recommencer, il n’y a pas de grand soir et pas de science de l’histoire. Mais son analyse du capitalisme est résolument nouvelle. Plus freudien que Freud, il élargit sa conception du désir. Plus marxiste que Marx, il étend la catégorie de la production désirante bien au-delà de la sphère économique. Cette présentation est une introduction à l’œuvre de Deleuze.
  • Pierre Leroux : la fraternité, maître-mot du socialisme (n°83) : Pierre Leroux (1797-1871) est un éditeur, philosophe et homme politique français, le premier à faire un usage systématique du terme « socialisme ». Animateur de revue, député à l’Assemblée constituante de 1848, il s’exile après le coup d’État de Napoléon III. Il est considéré comme le promoteur, redécouvert aujourd’hui, du socialisme mutuelliste et associationniste.
  • George Orwell, une oeuvre est une vie (n°67) : Connaître Orwell, du moins quand on accepte de prendre le temps de le fréquenter, c’est vivre une expérience de dialogue et de questionnement. Plus la lecture se fait attentive et passionnée, plus nous rencontrons un homme, certes un grand écrivain, honnête dans son être et conséquent dans son faire, mais si humain, respectueux d’autrui, censeur sévère de ses propres erreurs, homme d’une grande moralité, humaniste et penseur d’une grande portée politique et philosophique.
  • Amartya Sen : L’économie est une science morale (n°63) : En octobre 1998, le prix Nobel d’économie est décerné à Amartya Sen, économiste indien. À ses interviewers, il explique qu’il n’a pas de conseils à donner à ceux qui lui demandent comment placer leur argent, parce qu’il s’intéresse essentiellement à ceux qui n’ont pas d’argent à placer. Ce professeur hindou jure par rapport aux lauréats de ce curieux prix Nobel en économie créé par la Banque centrale suédoise.
  • Christian Arnsperger : le capitalisme est une culture (n°60) : La thèse de Christian Arnsperger est simple : le capitalisme réussit parce qu’il s’inscrit au plus profond du psychisme aliéné et apeuré et qu’il en épouse les tendances les plus mortifères. Le capitalisme est un régime des profondeurs autant que des surfaces.
  • Nancy Fraser, luttes culturelles et luttes de redistribution (n°55) : Nancy Fraser (1947) est une philosophe féministe états-unienne. Elle est professeure en sciences politiques et sociales à la New School University à New York et rédactrice en chef de la revue Constellations. Son œuvre s’efforce de penser trois dimensions constitutives de la justice : la (re)distribution des ressources, la reconnaissance au travers des contributions des différents groupes sociaux et la représentation par la médiation des productions symboliques et langagières. Elle s’inspire fortement de la théorie critique (École de Francfort dont les principaux représentants furent Th. Adorno, H. Marcuse et M.Horkheimer et plus récemment J. Habermas), de la sociologie bourdieusienne et des « gender » ou « queer » studies. Elle a publié de nombreux articles dans les revues progressistes américaines, dont la New Left review et Constellations.
  • Axel Honneth, les politiques de la reconnaissance (n°51) : Les partis démocratiques sont relativement mal à l’aise face à l’émergence de ces nouveaux enjeux: il s’agit d’enjeux portant sur la reconnaissance. En outre, à la différence des conflits «matérialistes», qui peuvent générer des compromis sociaux-démocrates, certaines revendications, dites «post-matérielles» peuvent à tout le moins questionner l’identité par les différences qu’elles marquent.